Dans le cas de dépassement des seuils de pollution dans l’eau potable en Bretagne, des protocoles rigoureux sont mis en place. Même si des mesures immédiates sont prises, certains défis persistent, notamment en matière de communication et d’investissements sur le long terme.
L’ARS Bretagne agit de manière plus précise sur une mission : la supervision du contrôle de l’eau potable.
Par exemple, prenons le cas de la station d’épuration de Belle-Isle-en-Terre. La station repère une odeur d’hydrocarbure (ce qui est anormal), le syndicat Traou Long présidé par Jean-Yves Le Corre est prévenu et décide d’arrêter temporairement le pompage d’eau le temps de comprendre l’origine du problème et de trouver une solution. Depuis cet incident, la station d’alerte est équipée d’un détecteur d’hydrocarbure sur les eaux brutes.
Cependant, que se passe-t-il et quels sont les processus effectués lorsqu’un dépassement du seuil est observé ?
Lorsqu’un dépassement du seuil de l’eau est observé, les autorités sanitaires françaises appliquent un protocole. Le préfet, le maire et l’exploitant de la distribution communique entre eux afin de faire face à la situation. Vincent Bessonneau, chef du département des sciences en santé environnementale (LERES) à EHESP, explique ce qu’il se passe lorsque cela se produit :
Des mesures en cas de dépassement
Le préfet, le maire, et l’exploitant du réseau de distribution d’eau sont tenus de respecter ce protocole. Dès qu’une analyse d’eau révèle une non-conformité, l’exploitant doit agir immédiatement en avertissant le maire et le préfet, en menant une enquête approfondie, et en informant les autorités des conclusions. Si un risque pour la santé publique est avéré, le préfet peut ordonner à l’exploitant de mettre en œuvre des directives spécifiques. Des mesures correctives immédiates telles que l’arrêt de captage d’eau, le réajustement des procédures de traitement, le mélange des sources d’eau ou une connexion avec un autre réseau sont alors prises. Le préfet peut aussi décider de restreindre certains usages ou de suspendre temporairement la distribution d’eau, notamment pour les groupes de population sensibles comme les nourrissons ou les femmes enceintes. Pour ce faire, une communication officielle auprès de la population est alors diffusée par le biais des autorités sanitaires locales (ARS). Par exemple en Bretagne, dans les Côtes d’Armor, Jean-Yves Le Corre, président du syndicat d’eau de Traou-Long et Goas-Koll, nous explique : “Si y a des dépassements, les pompes s’arrêtent. Si il y a plus de pompage, on laisse passer le gros de la pollution”.
Il arrive que l’exploitant ne trouve pas de solution pour régler le problème de dépassement durable. Dans ces cas-là, une dérogation de 3 ans lui peut être demandée au préfet, renouvelable deux fois sous conditions. Dans ce temps imparti, l’exploitant se doit de trouver des solutions adéquates aux problèmes de dépassements.
Le seuil de réglementation concernant la pollution de pesticides dans l’eau est élevé à 0,1 μg/l (microgramme par litre). En 2021, l’ARS a procédé à plus de 14 000 prélèvements d’échantillons d’eau en Bretagne donnant lieu à plus de 741 000 résultats d’analyse. La même année, 39,7% de la population bretonne a été concernée par un dépassement ou était à la limite du seuil, sans toutefois franchir les valeurs sanitaires maximales (Vmax). Le maximum enregistré sur le seuil a été de 1,7 μg/l en ESA-Métolachlore (un des principaux métabolites de pesticide responsables des dépassements des limites de qualité de l’eau potable).
Quels sont les types de seuils d’eau?
Les seuils de qualité de l’eau se distinguent en deux types : les seuils réglementaires et les seuils sanitaires. Alors que les seuils réglementaires définissent les limites acceptables pour les substances telles que les pesticides dans l’eau potable, les seuils sanitaires évaluent les risques pour la santé associés à ces substances.
Si la concentration dépasse le seuil réglementaire mais reste en dessous du seuil sanitaire, l’eau peut être consommée sans restriction immédiate, mais des mesures correctives sont nécessaires.
Des connaissances techniques sont nécessaires pour faire une analyse de l’eau. Les méthodes d’analyse sont définies par le CEN (Comité Européen de Normalisation), et s’imposent au niveau de l’AFNOR en France. Les techniques d’analyse sont nombreuses comme la chromatographie en phase gazeuse par exemple. Il s’agit d’une technique séparant les différents types de mélanges gazeux ou vaporisés, enfermés dans un four à une température contrôlée.
Qu’en est-il de la communication ?
Lorsqu’une dérogation est délivrée, la population concernée est informée par la personne responsable de la production ou distribution d’eau. Le consommateur peut à tout moment se rapprocher de sa mairie pour savoir si des dérogations sont en cours dans la ville ou commune où il habite. Du côté des laboratoires d’analyse, une fois les échantillons envoyés à l’ARS, aucun retour n’est donné pour connaître l’existence d’un dépassement ou non. “On le voit parfois sur les analyses lorsqu’il y a un dépassement mais l’ARS ne revient pas vers nous pour nous le confirmer. On apprend en tant que citoyen quand il y a un dépassement. La communication pourrait être un peu mieux.”, a exprimé Vincent Bessonneau.
Des solutions à court et long terme envisagées
Pascal Hervé, vice-président Eau et Assainissement à Rennes Métropoles estime que le dépassement des seuils d’eau n’a pas lieu d’être et qu’une eau contaminé ne serait pas commercialisée.
Par souci de coût, des solutions à “court terme” sont trouvées. Un exemple qui peut étonner est le cas de la commune de Saint-Mayeux. Face au dépassement du seuil de métabolites dans l’eau, la commune costarmoricaine a donc privilégié l’alternative de continuer à utiliser l’eau à condition qu’elle soit diluée. Une solution certes moins coûteuse et autorisée par l’ARS, mais à un prix écologique : car même si le seuil redescend grâce à cette dilution, l’eau à la base polluée l’est toujours.
La question des solutions à long terme n’est pas évidente à répondre. L’un des problèmes principaux est le manque de moyens financiers.
Janyce Gallard et Bérénice Claude